Alors que le monde arabe est en plein essor, au IXe siècle, le calife de Bagdad Al Ma'mun remporte une victoire éclatante sur les armée byzantines.
Dans les conditions de la victoire, il demande expressément, en échange de la libération de prisonniers chrétiens, des...livres.
Parmi ces livres qui font le voyage depuis les bibliothèques bizantines jusqu'au bibliothèques naissantes de Bagdad, il en est qui va avoir une importance toute particulière pour le Monde : le Siddhantha, de l'auteur indien Brahmagupta.
Dans ce traité d'astronomie, écrit un siècle plus tôt, on va trouver dix petites figures qui vont à jamais marquer l'histoire : eka, dva, tri, catur, panca, sat, sapta, asta, nava et la dernière, la plus importante çunya.
Vous l'aurez tous compris, il s'agit de nos fameux chiffres 1,2,3,4,5,6,7,8,9 et le fameux 0.
(petite parenthèse étymologique : çunya signifie "vide" en sanskrit, qui est alors représenté par un petit rond, le vide. Traduit en arabe, vide devient "sifr" qui donnera zephirum en latin, puis zephiro en italien. Et de zephiro à zero, il n'y a qu'un pas que les gens de l'époque n'ont pas hésité à franchir).
Et là, on comprend instantanément que ces chiffres que nous appelons chiffres arabes sont en fait indiens. Ils ne sont nommés chiffres arabes que parce que ce sont les arabes qui les ont popularisé dans le monde occidental. Mais leurs véritables inventeurs sont bien les indiens.
Et mine de rien, cette invention est peut être l'une des plus importantes de l'humanité.
Jusqu'alors, chaque civilisation avait un système de numérotation mais bien compliqué pour la plupart et peu adapté au calcul. Nous connaissons tous par exemple le système des chiffres romains. Ici la valeur du chiffre ne dépend pas de sa position. le X signifie 10 quelque soit la place qu'il occupe dans le nombre romain. Alors, on ne dirait pas, mais ça devient vite ennuyeux dès lors qu'il faut ecrire des grands nombre. 10 = X; 30 = XXX; 50 = XXXXX = L (heureusement !) et on se dit alors que pour écrire de grands nombre, on aura bientôt besoin de l'alphabet tout entier.
Alors que dans le système indien, c'est la position du chiffre qui lui confère sa valeur. Et la présence du zéro démultiplie la valeur de ce chiffre s'il est placé à sa droite.
Le 1 peut valoir un, ou dix, ou cent selon sa place par rapport aux zeros et il sera plus fort que deux 9. "Un nain assis sur la plus haute marche est plus haut qu'un géant dressé sur la plus basse" dit un vieil adage...arabe.
Ainsi avec seulement 10 signes, on peut écrire tous les nombres du monde. C'est tout simplement exceptionnel ! Et je crois bien qu'à notre époque on n'arrive pas à se rendre vraiment compte de la portée de cette invention pour les mathématiciens du Xe siècle.
Ajouter un zero à la droite d'un chiffre permettait de passer dans la dimension d'unité supérieur sans que cela prenne trop de place.
Ce nouveau système, doté de règles, permettait en outre de réaliser des calculs !
Ceci explique la fabuleuse avance des mathématiciens arabes sur le reste du monde à cette époque.
Le zero fut introduit en Europe seulement au 13e siècle. Et il eut la vie dure auprès des inquisiteurs qui l'estimaient diabolique. Il fut surnommé le grand annihilateur.
Mais les choses se sont arrangées lorsque l'Eglise comprit le trop bon intérêt d'avoir de bons comptables.
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