dimanche 22 avril 2012

Vous auriez l'heure ?

Il n'a pas toujours été simple de répondre à cette question.
Ne serait-ce que parce que très longtemps, il n'y avait pas de montre, d'horloge, de pendule ou de tout autre système de mesure du temps.

Comment faisaient alors les anciens pour se repérer dans le temps ?
A une petite échelle, le cycle jour/nuit suffisait bien. Le cycle de la lune équivalait ensuite à notre notion de mois (une lunaison dure 29,5 jours) et à plus grande échelle les solstices et équinoxes donnaient l'information des saisons actuelles.
Quand on se donnait rendez-vous à l'époque, c'était donc plus du genre "On se retrouve ici dans 2 lunes et 6 jours" (avec une précision d'environ 12 heures) que "19h45 pétante devant le ciné". La notion de ponctualité n'était donc pas trop de mise...

Mais pourquoi s'intéresser au temps ? Qu'est ce qui justifie qu'on veuille autant le mesurer ?
Bien avant la mesure du temps pour planifier les semences et les récoltes (disons que c'est mieux de ne pas planter avant l'hiver qui détruira tout...), la question s'est posée en raison du caractère mortel de l'Homme.
Quel intérêt en effet a t'on à mesurer le temps si on est éternel ? Le temps n'est une notion valable que quand il y a un début et une fin et la mesure de la vie humaine en était une bonne raison.

Les premiers systèmes de mesure du temps furent basiques. Tel le gnomon, bâton planté dans le sol et dont l'ombre projetée par le soleil permettait de suivre sa course circulaire sur le sol et donc la journée. Ancêtre du cadran solaire et qui explique au passage pourquoi nos montres sont rondes.
Comment est venue la division de la journée en 12 heures suite à cela (et non en 10 comme on aurait pu s'y attendre dans notre société décimale) ? J'en avais déjà parlé dans mon petit article sur les Babyloniens mais pour faire simple, il faut juste savoir qu'à cette époque, les hommes étaient nomades. Et le système qui prédominait était alors le troc. Et très vite les gens se sont rendus compte que la base 10 se prêtait assez mal aux échanges (si j'ai 10 chèvres et que je veux les diviser entre mes 3 fils, je vais vite avoir un problème). La base 12 en revanche se prêtait beaucoup mieux aux divisions car 12 admet davantage de diviseurs (2,3,4,6) que 10 (2,5).
C'est donc le système comptable à cette époque qui a orienté la division du temps et il était donc normal qu'on divise une journée en 12 parts plutôt qu'en 10.

Les systèmes de mesure du temps ont évolué.
On a connu la clepsydre (littéralement "échappement d'eau") avec cette petite imprécision au début qui venait du fait que la vitesse d'écoulement d'un fluide dépend de sa pression et que donc plus le récipient se vidait, plus la pression d'écoulement diminuait et donc le temps mesuré n'était plus constant.



Les Égyptiens perfectionneront ce système en intercalant une jarre "tampon" entre les deux précédentes, jarre toujours remplie à ras bord et qui assurait donc un écoulement constant dans la jarre du bas.

Le sablier est ensuite apparu mais tous ces systèmes de mesure du temps avait un gros problème : dès qu'il faisait nuit et qu'on ne voyait plus rien, on avait vite un problème pour connaitre l'heure.

On inventa alors les bougies horaire mais là question risque d'incendie, on était pas non plus très serein...


Pour faire un aparté sur ce point, c'est la raison pour laquelle (plus tard) on inventera les répétitions-minutes. Alors qu'aujourd'hui, une RM ne sert qu'à prouver son savoir-faire horloger, et au passage ajouter un zéro au prix de la montre, au moyen-âge il y avait une réelle utilité à la complication : connaitre l'heure la nuit.
Parce qu'on avait bien les crieurs d'heure qui tournaient en ville la nuit en hurlant "Il est 3hhhhhh, toutttt va bieeeeeeennnn !!", mais ça dérangeait pas mal de monde qui ne demandait rien à personne si ce n'est dormir tranquille.

Et puis vers le milieu du moyen-âge, on va faire une série de découverte techniques qui vont rendre possible la création d'horloge.
D'abord, on va découvrir l'isochronisme du pendule. Cela veut dire que si vous prenez un pendule (une bille de plomb suspendue par un fil) et que vous le lâchiez d'un angle quelconque par rapport à la verticale, il passera par le point zéro aux mêmes instants. La période est donc indépendante de l'amplitude ! Il ira juste plus vite pour une distance plus grande mais il conservera la même fréquence.



On avait donc ainsi un système qui puisse mesurer le temps de manière régulière. (De cela en découlera les vieilles pendules de salon avec le balancier qui se balance de gauche et de droite avec un tic tac bruyant et omniprésent).



Sauf qu'en l'état, le problème était qu'un pendule n'allait pas battre la mesure indéfiniment. A cause des frottements de l'air, il finira par s'arrêter. Il fallait donc un moyen de lui fournir régulièrement de l'énergie pour entretenir ce mouvement.

Et c'est là que le ressort entre en scène. Un ressort est un système mécanique qui accumule et restitue de l'énergie. Si on trouvait donc un système capable de transmettre l'énergie du ressort à un pendule et entretenir ainsi ses oscillations, on aurait un moyen de mesurer durablement le temps !

La corporation des serruriers sont alors les premiers vers 1450 à créer un système mécanique d'entrainement. Ils utilisent alors la gravité via un système de poids qu'on remonte avec une poulie et qui en descendant va entrainer un système mécanique dont les rouages (la roue avait heureusement été inventée bien avant) permettront d'engrener et multiplier le mouvement.
La notion de "remonter" une montre vient donc de ces première horloges fonctionnant grâce à la gravité.
Le temps faisant, les serruriers se spécialiseront et deviendront horlogers.

Or à cette époque (fin du XVe siècle) on se trouve en plein dans la période des grandes découvertes maritimes. Et une pendule ne marche qu'à la verticale parfaite pour mesurer le temps, chose difficilement possible avec le tangage des bateaux. C'est pour cette raison d'ailleurs que Christophe Colomb, lors de son périple transatlantique, ayant peu confiance dans les pendules de l'époque, utilisait un sablier qui devait être retourné toutes les 30 minutes par un matelot.

Les grandes conquêtes donneront le signal au développement de l'horlogerie actuelle.
Il fallait des systèmes précis pour se repérer en mer. La latitude s'obtenait assez facilement par observations du ciel et mesures, en revanche le calcul de la longitude était beaucoup plus délicat et imposait d'avoir des systèmes de chronométrage du temps précis à bord.
Et puis, il est bien gentil de partir à la découverte de terres inconnues, on se laisse porter au vent et on voit où on arrive mais à un moment, il faut quand même bien rentrer chez soi...

Bref, c'est pour cette raison que les Anglais, via leur marine puissante, furent les premiers contributeurs à l'horlogerie, notamment dans l'invention du balancier spiral.
Le ressort qui accumule et redonne l'énergie se trouve alors sous la forme d'un spiral


sur lequel est fixé une roue (le balancier) qui oscille et entretient l'isochronisme.

A partir de là, le principe de base est défini et les systèmes évolueront peu jusqu'à nos jours :

Un barillet (ressort) accumule de l'énergie par le remontage (manuel ou automatique) qu'il libère en entraînant une succession de rouages (heures, minuterie, seconde, ...) jusqu'à la roue d'échappement qui laisse "échapper" l'énergie du barillet de manière contrôlée grâce à l'ancre dont le mouvement est régulée et entretenu par le balancier et son spiral. Les marches des roues d'heure, minutes, secondes sont réalisées dans des rapports de démultiplications calculées qui permettent de suivre le rythme des heures, minutes, secondes.

Pour conclure, l'horlogerie actuelle et la mesure du temps telle qu'on la connait aura été rendu possible grâce à quatre grandes inventions humaines combinées entre elles :

- La roue, qui permet l'engrenage et la transmission. C'est ce qu'on appelle l'organe multiplicateur.
- Le ressort, qui permet l'accumulation et la restitution d'énergie. C'est l'organe moteur.
- Le pendule, qui évoluera en un spiral et une roue de balancier, qui permet l'isochronisme et la régulation de  l'énergie libérée. C'est l'organe régulateur.
- La métallurgie car on oublie que sans cette invention de l'ère industrielle, rien n'aurait été possible (des roues en bois dans une montre, ça le ferait moyen question précision et longévité...)

L'horlogerie est un batard technologique dans le sens où ça ne sert plus à rien de nos jours. On a mieux, plus précis, moins cher, plus rapide mais c'est quasiment l'un des seuls batards technologiques qui a survécu de nos jours.
Car il faut bien l'admettre : outre le fait qu'un mouvement horloger fascine par sa capacité à mécaniser le temps, notion par définition abstraite, il faut aussi reconnaitre que c'est drôlement beau...



(Ceci est ma synthèse d'un cours d'horlogerie théorique de M.Figols, crédits et merci à lui pour ce moment passionnant !)

samedi 11 février 2012

Viracocha, le Grand Civilisateur

Cet article est ma synthèse de ce que j'ai pu lire dernièrement sur ce sujet fascinant qu'est le mythe de Viracocha, couplé avec une des célèbres théories de l'explorateur Thor Heyerdahl. 
Je propose ici de recoller les morceaux de nombreuses théories et mythes existant.



Toutes les civilisations pré-colombiennes d'Amérique Centrale et d'Amérique du Sud ont en commun dans leurs légendes la venue à une époque reculée d'un homme blanc, grand, barbu, vêtu d'une toge blanche, déambulant avec un bâton, un livre et quelques fidèles et apportant sagesse, sciences, lois et principes de civilisation à leurs ancêtres qui vivaient là.

Cet homme appelé Viracocha ou KonTiki par les Incas,  Quetzacoalt par les Aztèques et Toltèques, Kukulkan par les Mayas ou encore Bochica chez les Chibcha aurait surgi de l'océan de l'Est sur de "grands bâteaux aux ailes de cygne" (des voiles donc...).
Viracocha n'était pas seul puisque d'autres étrangers blonds à la peau blanche seraient descendus avec lui et auraient entrepris ce grand périple vers le Sud, civilisant les hommes qu'ils rencontraient sur leur chemin.

Ces légendes indiennes, compilées notamment par le chroniqueur espagnol Cieza de Leon, parlent toutes d'un homme bon, doux, parlant avec calme, enseignant et enjoignant les populations à vivre en paix et harmonie les uns avec les autres.

Viracocha se serait établi vers la fin de son périple à Tiahuanaco, au sud du lac Titicaca et y aurait fondé une ville d'un haut degré de civilisation qui continue d'intriguer à ce jour les archéologues, notamment par la présence de constructions gigantesques (les récits indiens parlent de "géants blancs déplaçant les pierres dans les airs") et de "quais" à une hauteur qui ne pouvait être celle du lac qu'il n'y a 15000 ans.


Mais suite à une rébellion fomentée par le chef Cari de Coquimba, Viracocha aurait été contraint de s'enfuir par la mer vers l'Ouest, non sans promettre aux peuples restés fidèles qu'il reviendrait bientôt.

Et c'est précisément cette promesse d'un retour prochain, qui perdura dans la mémoire des peuples sud-américains, qui causera leur perte lors de l'arrivée des siècles plus tard des conquistadors espagnols au XVIe siècle.
En effet, persuadés qu'ils assistaient au retour tant attendu de Viracocha, les indiens accueillirent les Espagnols avec candeur et naïveté, n'opposant aucune résistance à leur avancée.


Quand ils comprirent les intentions destructrices et de conquêtes des envahisseurs, il était déjà trop tard pour réagir et c'est en partie pour cette raison (en plus des armes et des chevaux qui les terrorisaient) qu'une petite troupe d'une centaine d'hommes aux ordres d'Hernando Cortès a pu ainsi soumettre sans mal tout un empire de plusieurs centaines de milliers de personnes.

Mais revenons à notre ami Viracocha. La légende dit qu'il s'enfuit par l'Ouest. Faisons le lien avec une autre théorie défendue par Thor Heyerdahl : le peuplement de la Polynésie non pas par des habitants de l'Asie du Sud Est mais par l'Amérique du Sud.

En 1947, alors qu'il se trouve en Polynésie, Thor Heyerdahl entend parler par un vieil autochtone de la légende selon laquelle un dénommé Tiki serait venu par la mer d'une grande terre située à l'Est pour peupler les îles de la région.
Il élabore rapidement une théorie selon laquelle le peuplement des îles polynésienne ne serait pas du à une migration d'ouest en est depuis l'Asie mais d'est en ouest depuis l'Amerique.
Il met tout de suite sa théorie à l'épreuve des faits expérimentaux en construisant un bateau de balsa (qu'il baptisera "KonTiki") selon les techniques sud-américaines de l'époque et s'élance dans la traversée du Pacifique depuis le Pérou.


3 mois de navigation plus tard, il aborde sur les îles Tuamotou, prouvant ainsi qu'une telle migration était bel et bien possible à l'époque.

L'histoire de l'Ile de Pâques est quant à elle tout assi fascinante. On connait tous ses fabuleux Moais, géant de pierre longtemps demeurés mysterieux quant à leur érection jusqu'à ce que les scientifiques expliquent leur transport et l'utilisation abusive des ressources en bois de l'ile jusqu'à la disparition complète de ses forêts et l'auto-destruction de sa population.
On sait, d'après les recueils des premiers explorateurs, que l'île était initialement constituée de deux grands clans : les Grandes Oreilles qui gouvernaient et érigeaient les Moais et les Petites Oreilles, main d'oeuvre ouvrière de la première. Plus tard, alors que sans ressource, l'ïle va être le théatre d'une violente révolte des Petites Oreilles, les statuts seront renversées de colère et les Grandes Oreilles massacrées.

N'est il pas alors possible, en joignant tous ces morceaux, d'imaginer que les Grandes Oreilles, pascuans civilisés et bâtisseurs, aient pu être issus de Viracocha fuyant l'Amerique du Sud et débarqué sur l'ïle ?
Que les Petites Oreilles furent peut-être issus des peuples d'Asie du Sud Est et mis en esclavage par les premiers, plus évolués qu'eux ?
Ceci s'illustre d'autant plus par le fait qu'au sein de la civilisation Inca, seuls les nobles étaient autorisés à se laisser agrandir le lobe de l'oreille par le port de poids suspendus.
Or n'y a t'il pas une ressemblance évidente de ce point de vue entre cette statuette inca et ces moais ?




Que le fameux Pukao, le "chapeau" rougeatre que l'on voit sur la tête de certains Moais, n'est pas non plus sans rappeler le turban que les chefs Incas portaient ?
Que les statuts présentes à Tiahuanaco, la dernière cité de Viracocha, présentent une ressemblance notable avec les statues pascuanes ?


Sans compter que la patate douce, base de l'alimentation des peuples polynésiens n'a jamais existé en Asie du Sud Est mais uniquement en Amérique du Sud.

Sans rejeter le peuplement par l'Asie, il reste donc toutefois tout à fait possible d'imaginer qu'il y ait aussi eu un peuplement via l'Amérique du Sud, peuplement qui pourrait pourquoi pas être issu de la fuite de Viracocha, le "Dieu" civilisateur des mythologies pré-colombiennes, Dieu qui n'aurait rien de divin mais qui serait un homme issue d'une ancienne civilisation plus développée que celles existantes à l'époque en Amérique et qui aurait ainsi vu en lui, de par ses connaissances, un être supérieur.

Se pose alors une autre question tout aussi fascinante : celle de de l'origine de Viracocha, cet homme grand, blanc et barbu, qui serait arrivé par la mer pour apporter la civilisation.

Allons, un petit effort...
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Vous ne voyez toujours pas ?
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Quelle terre  mythique, habitée par des hommes sages et hautement évolués, aurait existé à l'Est de l'Amérique du Sud, terre qui aurait disparu brusquement, poussant ses survivants à fuir vers les terres alentours ?